vendredi 29 juillet 2016

Lu " De nos frères blessés" de Joseph Andras, paru chez Actes Sud.


C'est le premier roman de l'auteur, qui a un peu plus de trente ans et vit en Normandie.

Il relate ici l'histoire douloureuse de Fernand Iveton, ouvrier communiste qui se solidarisa avec le FLN, et fut arrêté alors qu'il venait de poser une bombe dans l'usine d'Alger où il travaillait. Bombe qui n'explosa pas et ne fit donc aucune victime. On est en 1956. La suite est terriblement douloureuse : tortures en tous genres, gégène, procès expéditif et, in fine, condamnation à mort et guillotine. On tient là un procès terrible de cet aspect le plus condamnable de la 4eme République.

C'est bien écrit, vivant et prenant bien sûr. Même si le procédé littéraire, sans guillemets quand on cite, les paroles viennent comme ça, dans le récit, ni ordre chronologique, on passe d'une époque à une autre, d'un paragraphe à l'autre, est parfois un peu déroutant. Mais on s'y habitue et le résultat est un beau livre pour ceux qui n'ont pas peur d'affronter cette époque terrible, ces heures sombres qu'il faut savoir regarder en face, mais qui sont dures et difficiles à aborder 60 ans après...

lundi 25 juillet 2016

Lu " Le nouveau nom" de Elena Ferrante paru chez Gallimard et traduit de l'italien par Elsa Damien.


C'est le deuxième  volet du récit d'une histoire d'amitié entre deux femmes napolitaines d'un quartier très populaire de l'après-deuxième guerre mondiale, après " Une amie prodigieuse" racontant leur enfance et leur adolescence et que j'avais déjà beaucoup aimé.

Le récit est donc celui de l'entrée de ces deux femmes dans l'âge adulte. Et c'est toujours d'une violence infinie et pleine de tendresse. A moins que ce ne soit d’une tendresse très violente.



Quel beau livre. Quel très beau livre....

3 jours au festival d'Avignon pour rompre - enfin !- avec une longue incurie : je n'y étais jamais allé.


Et si j'ai retrouvé cette ville magnifique que je connaissais depuis longtemps, j'ai découvert ce bouillonnement culturel époustouflant avec gourmandise.

Et je me suis " gavé" ...13 spectacles dont 4 chorégraphies - dont le " Babel 7-16" de Sidi Larbi Cherkaoui dans la cour d'honneur du Palais des papes-, une évocation poétique - Baudelaire, Rimbaud et Verlaine dans un garage aménagé à 11h du matin- et 9 pièces de théâtre, de qualité très inégale mais dont je retiendrai surtout le " Une vie sur mesure " de Cédric Chapuis, original et plein de tendresse,  ou " Le cœur cousu", adaptation du roman de Carole Martinez,  dur et pathétique. Rien que cela ! Mais l'offre est si diverse, si tentante, qu'on voudrait tout voir. Et, du coup, on en voit probablement trop. Mais cette ambiance est culturellement si féconde, collectivement si joyeuse, intellectuellement si riche,  qu'on se dit, forcément, que " là" est la réponse. La réponse aux maux de ce monde, la réponse à la violence, à la barbarie.


Avignon et la création contre l'obscurantisme.

Après l'épouvantable attentat de Nice,


Ce qui me frappe, après l'épouvantable attentat de Nice, ça n'est pas tant ce nouvel aspect du terrorisme, qu'on dira " franchisé", immergé sournoisement dans de nombreux plis de la société et sur lequel on ferait bien de s'interroger collectivement, par exemple en multipliant les études et les recherches sur son cas, que les fractures profondes de la société française qu'il révèle.

Je ne parle pas des fractures politiques et le refus de l'unité nationale alors même qu'elle semble plébiscitée par nos concitoyens. Ces jeux politiques sont de plus en plus décalés. Non, je parle des fractures terribles de notre " vivre ensemble" qui s'expriment de plus en plus ouvertement. Par le racisme exacerbé, notamment.

Et c'est pourquoi il me semble que nous devrions tous avoir l'ardente obsession de "recréer du lien civique" pour reprendre l'excellente expression de mon ami Abdenour BIDAR. Et quand je lis que Julien DRAY propose d'instaurer un service civique obligatoire, je dis bravo.

Il y a des années que je le préconise et je me réjouis de ce renfort : que tous les jeunes hommes et toutes les jeunes femmes du pays, donnent 6 mois de leur vie à servir la communauté nationale, y compris dans le domaine de la lutte civique contre le terrorisme - mais pas seulement- me paraît être une ardente obligation.

Mais quel politique en aura le courage ?

mercredi 20 juillet 2016

Une nouvelle fois, l'Observatoire de la laïcité se trompe gravement !




Une nouvelle fois, l'Observatoire de la laïcité se  trompe gravement !



En demandant le retrait de l'article 1bis A du projet de loi " travail" actuellement en troisième lecture au parlement, l'Observatoire de la Laïcité se trompe gravement:

Il se trompe sur la forme et sa mission

Il se trompe en droit

Il se trompe sur la nature des problèmes qui se posent à la société française.

 
Il se trompe sur la forme et, en particulier, sur sa mission : le décret qui a créé l'Observatoire et qui définit ses missions ne l'autorise en rien à s'immiscer dans un processus législatif, au beau milieu de celui-ci et de faire ainsi injonction aux élus du peuple. Faut-il lui rappeler que les travaux du Parlement ne sont contraints que par les règlements de nos deux assemblées et, a posteriori, que par les décisions du juge constitutionnel ? Les " juristes " de l'Observatoire feraient bien de respecter le droit.

Il se trompe en droit quand il parle de l'insécurité juridique qu’induirait cet article, introduit à la demande de nombreux laïcs, et qui prévoit que le principe de neutralité de l'entreprise peut être inscrit dans son règlement intérieur. Car cette insécurité, elle existait et c'est celle qu'a subie la directrice de la crèche Baby Loup pendant des années sans que ne s'en émeuvent jamais les responsables de l'Observatoire. L'insécurité, c'est celle de l'entreprise Paprec qui a fait adopter une charte de la Laïcité par accord d'entreprise qui pouvait être cassé à tout moment par un tribunal faute de fondement juridique. Les responsables de l'Observatoire en sont-ils restés à une conception archaïque de l'entreprise qui ne serait qu'une juxtaposition d'individus dont il faudrait protéger les libertés individuelles, sans voir qu'elle est souvent devenue une communauté de destin où l'on peut élaborer des projets communs, construire du " commun" ?

Il se trompe encore plus gravement sur la nature des problèmes qui se posent à la société française et que la tragique série d'attentats qui la frappe rendent encore plus sensibles : plus que jamais, les Républicains, les vrais, doivent distinguer les religions et le libre exercice de leurs cultes que la République doit protéger, et les intégrismes, les fanatismes religieux que la République doit combattre sans faille, avec fermeté et détermination. C'est cela la laïcité, un équilibre entre droits et devoirs. Et l'obsession de la garantie de la liberté ne doit pas entraîner la faiblesse dans la lutte contre les intégrismes. C'est une question centrale sur laquelle l'Observatoire continue, hélas, de se tromper gravement.



Jean GLAVANY – Patrick KESSEL – Françoise LABORDE

Membres de l’Observatoire de la Laïcité


mardi 19 juillet 2016


Je ne veux surtout pas polémiquer avec Christian ESTROSI, d'abord parce que l'heure n'est pas du tout à la polémique, ensuite parce qu'à l'occasion de son deuxième tour aux élections régionales face à Marion Marechal Le PEN, j'avais trouvé que l'homme avait fait un joli pas sur le chemin républicain, enfin parce qu' à l'Assemblée nationale, ces dernières années, nous avons tous les deux construit une relation cordiale, dussé-je choquer les rétrogrades qui pensent que les hommes de gauche et de droite ne doivent pas se parler. Quitte à aggraver mon cas,  je dois dire que le passionné de sport que je suis n'est pas insensible au côté brut de décoffrage de l'ancien champion de moto…

Ce n'est donc pas du tout l'homme que je vise, mais les responsables politiques, de droite ET de gauche, qui parlent  trop et trop vite, sous la pression des médias qui nous poussent sans vergogne à la faute de l'immédiateté, de l'émotion et du spectaculaire. Faire le buzz, comme on nous y invite chaque jour, devient carrément irresponsable dans les situations tragiques que nous vivons où il faut surtout du calme et de la lucidité sereine...

J'en reviens donc à ESTROSI. L'actualité et sa mémoire infaillible, nous rappellent les deux déclarations qu'il avait faites devant le conseil municipal de Nice en janvier 2015, quelques jours après les attentats de Charlie Hebdo et de l'hyper cacher :

Dans la première, il stigmatisait les élus du Front national et leur esprit polémique: " il faut être capable de nous retrouver au-delà de nos divergences politiques". Il avait bien raison. Pourquoi a-t-il oublié cette règle républicaine un an après ?

Dans la seconde, il vantait Nice, ville la plus sûre de France, en soulignant les investissements réalisés dans la vidéosurveillance : " Avec 999 caméras, nous en avons une pour 343 habitants contre une pour 1532 à Paris. Je suis convaincu, ajoutait-il, que si Paris avait été équipé du même réseau que le nôtre, les frères Kouachi n'auraient pas passé 3 carrefours sans être neutralisés "...

Évidemment, cette déclaration résonne aujourd'hui d'une façon pathétique. Mais oublions ESTROSI qui n'est pas le seul à tomber dans ce piège infernal. Quand donc tous ces responsables politiques qui se précipitent pour commenter dans l'immédiateté et l'émotion, comprendront-ils qu'il est des moments où il faut savoir se taire et qu'on n'est jamais contraint de parler, de répondre à un micro tendu, à une caméra dirigée vers vous ?

Pourquoi donc ont-ils tous oublié ces vieux principes d'éducation et de civisme, le silence est d'or, il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche...?

La réponse est toujours la même : faire l'actu, le buzz, être dans le film, ne pas laisser une occasion de passer dans le petit écran.

Mon père m'a un jour appris un vieux dicton de l'armée de l'air : " il vaut mieux fermer sa g..., quitte à passer pour un c…que l'ouvrir et ne laisser aucun doute sur le sujet".

Encore une règle désuète sans doute.


samedi 16 juillet 2016

Nice

Je suis niçois
Je suis un anglais en promenade
Je suis un enfant ébahi devant un feu d'artifice
Je suis fetnat
Je suis hébété, sidéré, abasourdi, tétanisé
Je suis solidaire, bouleversé, ému, triste
Je suis révolté, en colère
Je suis déterminé, mobilisé
Je suis profondément épris de
Liberté égalité fraternité
Je suis français

mercredi 13 juillet 2016

Abdennour Bidar


Je suis au Ministère de l’Education Nationale où Najat Vallaud Belkacem décore mon copain philosophe, Abdennour Bidar.

Je crois que « Abdennour » en arabe, veut dire littéralement « serviteur de la lumière ».

Abdennour est un serviteur des Lumières. De la philosophie des Lumières.  

Son dernier livre, que je suis en train de lire, évoque « les tisserands », ceux qui créent du lien. Le lien avec soi-même, celui avec les autres, le lien avec la nature.

Abdennour m’a appris cette leçon d’Aristote sur le dialogue : pour être vrai et riche, un dialogue doit réunir 3 conditions. La compétence (savoir de quoi on parle), la sincérité (dire ce que l’on pense), la bienveillance (respecter celui avec qui on parle).

               Une leçon d’Aristote pour les usagers virulents des réseaux sociaux ?

Meeting d'Emmanuel Macron


Meeting d’Emmanuel Macron hier soir à Paris : les commentaires vont bon train…
Les journalistes se précipitent sur nous à l’Assemblée nationale : « soutenez-vous Emmanuel Macron ? » !
Sans vouloir biaiser, je réponds inlassablement que je soutiens l’action du Ministre de la République qui se bat au quotidien pour le redressement économique et industriel de notre pays.
               Mais je vois que ça ne suffit pas à la curiosité des journalistes : « Mais vous l’avez reçu dans votre département samedi et vous avez même déjeuné avec lui ! »
               La belle affaire. Macron venait sur le Tour de France et souhaitait déjeuner au col du Tourmalet dans un restaurant d’altitude qu’il connait bien et dont le patron, Eric Abadie, est un de mes copains.
Nous sommes à La Mongie, station pyrénéenne au cœur de ma circonscription.
               Le Ministre m’avait chargé de « faire la table », de lancer les invitations. Mais, comme je ne voulais pas être instrumentalisé en sergent-recruteur, j’avais composé une table très républicaine avec les élus locaux du territoire, de Droite comme de Gauche.
               Et j’ai parlé à Macron lors de ce déjeuner fort agréable dans ce décor de rêve.
Je lui ai dit : « n’oublie pas deux choses :
-        la première c’est que la politique est une aventure collective. Il y a des ambitions individuelles et c’est bien normal, mais elles ne sont que la traduction d’un combat collectif. Le combat collectif de ceux qui portent les mêmes convictions. Il n’y a pas d’aventure individuelle.
-        La seconde c’est que si tu aspires à une destinée individuelle par le suffrage universel, il te faut commencer par respecter, profondément, les élus du suffrage universel, comme ceux qui sont autour de cette table, qui sont le socle vivant de notre démocratie et qui se battent au quotidien pour faire prévaloir l’intérêt général.
N’oublie jamais ces deux règles de base car il me semble que tu ne les as pas encore bien intégrées »…
               Il m’a beaucoup remercié de ma franchise amicale.



lundi 4 juillet 2016

Disparition de Elie Wiesel

Le jour du départ d'une grande figure de la gauche française contemporaine, part aussi une lumière intellectuelle du monde : Elie Wiesel, homme de liberté, de résistance et de paix s'en va, 70 ans après avoir connu les camps d'Auschwitz et de Buchenwald, où il perdit son père, sa mère et sa sœur. Pendant 70 ans, cet homme né en Roumanie, rescapé de la Shoah, de culture profondément française et citoyen américain n'aura cessé de plaider pour la vigilance et la réconciliation. Et il nous a laissé beaucoup d'ouvrages de grande qualité, dont le bouleversant "la nuit". J'y ajoute, parce que je suis subjectif, le "mémoire à deux voix" , livre d'entretiens avec François Mitterrand que je conseille de relire.
Une belle lumière qui éclairait la conscience universelle s'est éteinte.

dimanche 3 juillet 2016

Disparition de Michel Rocard

D'abord, la surprise. Certes, il avait 85 ans, mais il me semblait avoir encore bon pied bon œil : il y a quelques jours à peine, je l'avais croisé à la terrasse d'un bistrot, près de l'Assemblée Nationale et il m'avait lancé un chaleureux "salut ! Comment vas-tu Alain ?"
C'était ça Rocard, chaleureux et distrait.
Quand je me suis engagé en politique, j'ai tout de suite été Mitterrandiste, parce que c'était pour moi synonyme d'une stratégie politique, le rassemblement de la Gauche à laquelle j'ai toujours adhéré et adhère encore. Michel n'était pas convaincu de cette stratégie. Alors, je l'ai combattu, au sein du PS, avant 81. Et je reste convaincu que le Congrès de Metz, en 79, a été le socle politique de la victoire de 81.
Puis la roue a tourné. Et Mitterrand a nommé Rocard premier Ministre en 88. J'entends des imbéciles raconter ce soir que Mitterrand ne pouvait pas faire autrement. Tu parles !c'est bien mal le connaître ...Non, Mitterrand a fait une analyse politique et un choix politique, qui avait un sens politique. Et les mêmes imbéciles qui racontent aujourd'hui qu'il y avait de la haine entre les deux hommes se trompent : ils ne s'aimaient pas, c'est sûr, mais ils étaient l'un et l'autre incapables de haine et, hommes d'Etat, capables de surmonter leurs différences, leurs divergences, leurs oppositions presque de nature pour servir leur pays. Et ils l'ont bien servi. J'affirme que cette cohabitation-là a été une période très utile à la France.
Et la roue a tourné encore. J'ai aidé Rocard à devenir le patron du PS en 1993 et j'ai travaillé un an à ses côtés. Et j'en garde un très bon souvenir : l'homme était simple, très chaleureux, très à l'écoute, adorant la délibération collective, prenant des pages de notes.
Voila, il n'était ni un stratège ni un orateur, plus intellectuel et technocrate que politique, sans doute pas un vrai leader, mais c'était un homme sincère, honnête et plein de convictions et avec de vraies qualités humaines.
Salut Michel.